Yama – 2 – Tensions et abandons
Je suis partie vaillante et tremblante, guerrière et inquiète pleine de ce que je crois être (une artiste), vide de ce que je peux. Après un été de doutes paralysants où chaque idée se fracassait sur le mur du possible, j'avais finalement soumis à Noa un projet sur lequel nous travaillions, fait de gazes de rouges mouvant et je venais en Israel le confronter au réel de la scène et de la danse.
Ce fut un séjour d'abandons. Abandon du connu et abandon à l'inconnu. Les gazes n'ont pas domestiqué la scene, leurs couches superposées donnant en complexité ce qu'elles devaient simplifier. Rina, la soeur et interprète, chorégraphique, de Noa me disait que je devais faire un cadre aux danseurs, pour créer de la tension. Je ne comprenais pas.
Je proposais que la danse se fasse de l'intérieur du corps, une antre aux parois accueillantes et restreignantes, une peau, théâtre de notre imaginaire.
J'étais comme une enfant devant l'océan déchainé qui ne sait pas si il doit l'affronter, le traverser ou juste le regarder, j'étais inquiète.
Qu'est ce que le réel? Existe-t-il ? Est ce cette mer devant laquelle je me débattais ou ce que je ferais d'elle, avec elle, pour elle?
Je me suis résolue à ne plus rien savoir, ni pourquoi j'étais là, ni les montagnes que j'avais déjà dépassées, ni celles que j'avais contournées. Oubliés les projets, les oeuvres, les poèmes, oublié ce qu'est la mer et ce que je suis. Oublié vous, pour lesquels je me faisais du soucis, inquiète de ne pas vous donner ce que je vous avais promis.
Que vous avais-je promis? Un voyage en terre inconnue, partager avec vous ce processus incertain.
Dépouillée de mes attentes, je me suis oubliée aussi, abandonnée à ce qui forcement viendra. Je suis rentrée dans l'eau, y ai entrainé Noa. Et nous avons joué aux possibles, oubliant ce qui était enfant et ce qui était vagues.
De retour depuis 15 jours, le vertige m'a repris, je vais y donner forme. C'est le chemin qui est le voyage, merci.